Où on se compare, et on se console. Des moustiques, aussi. (Bartleby 8.0)

Relaxer. Respirer autre chose que l'air putride de ses quartiers, voilà tout ce qu'elle désirait. Un choix facile lui avait été offert: d'une part elle pouvait demeurer cloitrée au milieu de ses murs, pourissants et gondolés par l'eau s'accumulant derrière et de l'autre elle pouvait s'aventurer dans les «grands espaces sauvages» que représentaient les quelques mètres carrés du «parc» mitoyen. L'air n'y était qu'un brin moins pollué et infecte mais voir le ciel lui faisait grand bien. Quelques personnes échappaient comme elle à la claustrophobie de leurs tombeaux urbains quoique aucun visage familier ne se trouve parmi eux. «Ça pourrait être pire,» pensait-elle. En effet. Certains n'avaient pas le privilège d'admirer le ciel au dehors, et ceux, rares, qui erraient entre deux rangées de tuyaux ne voyaient qu'un voile rouge écoeurant. Infectieux. «Mieux vaut être ici, malgré la puanteur.» Elle savait apprécier les petites choses. Tout en marchant sur la pelouse jaunâtre et infestée de vermine, se traînant les pieds, elle réfléchissait. Comme à beaucoup d'autres occasions par le passé, ses pensées l'amenaient au-delà des murs de son ghetto, la ou les vrais malchanceux, les vrais esclaves écoulaient leurs jours misérables sous un manteau de conduits. La vie dans les villes ne faisait pas d'épanouis, pas d'heureux. Moisissure, entassement, contrôle... Un paradis pourtant, comparé à la torture perpétuelle des gens recouverts. Bien entendu, elle-même ne pouvait accéder à leur sarcophage, étroitement surveillée et encouragée à me pas s'y risquer par les sbires des dirgeants. Mais les rumeurs...les rumeurs! Une guerre constante ayant pour enjeu autant les maigres ressources des territoires plafonnées que le contrôle de parcelles de tuyauterie. La maladie, la faim et le désespoir. La stagnation. La futilité. Les urbains chuchotaient tous les mêmes horreurs. Oui, ça pourrait être bien pire. «Apprécie ton minuscule parc grouillant de vers et de rats.» Avec cette pensée comme conclusion, elle estima son aventure réussie, prête pour un peu plus de tourments paraissant à présent bien insignifiants. Sa main écrasa instinctivement un moustique sur sa joue.

Ça pourrait être bien pire.

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