Frappe

«J'en ai aucune idée.»

L'autre retire sa casquette et se gratte la tête. Il soupire. Son expression est éloquente. Cette réponse ne le prend pas par surprise.

«C'est con. De la grosse connerie sale.»

Il y a dans sa voix plus de résignation que de colère. Son évaluation de la situation est aussi insignifiante que l'était sa question. Le marteau qu'il tient faiblement s'abat pour la énième fois. C'est la gravité qui donne la majorité de sa force au coup.

Crac.

Des vibrations douloureuses, de plus en plus douloureuses, lui parcourent le bras. Se succèdent les impacts. les vibrations. Ses cibles demeurent solides tandis que ses muscles se déchirent.

Crac.

Combien de coups faudra-t-il qu'il donne? Combien pourra-t-il en donner? Inutile de poser cette question à son compagnon.

«Autant qu'il le faudra.»

Évidemment. Réfléchir ne lui sert à rien. Il se parle, à la place.

Frappe. Donne des coups, fais juste frapper.

Crac.

Il frappe. Des débris s’empilent autour de lui, formant une barrière grandissante, cachant presque l'individu qui l'accompagne dans sa besogne. C'est sans importance.

Crac.

L'un comme l'autre, ils doivent casser. Rien de plus. Nouveau grattement de tête. Nouvel impact.

Crac.

L'un déclare: «C'est n'importe quoi.» Ce qui restait de colère dans sa voix s'est évanoui. L'autre l'entend à peine. Sous sa propre casquette, un discours se répète.

Fais juste frapper.

Y'a un morceau de trop

Y'a un morceau d'trop
Dans mon set Lego
Une plaque à deux pins
Qui fit pas sur mon auto

Je l'ai démontée
Je l'ai remontée
Pis t'es effronté
D'suggérer j'me suis trompé

Non
Y'a des morceaux d'trop
Dans mon set Lego
C'est des imbéciles
Mon sheriff à deux chapeaux

J'ai payé pour cent pièces
J'en ai eu cent deux
J'ai suivi les instructions
C'est eux autres les morons

STATUS: POWERED ON. ALL SYSTEMS FUNCTIONAL.



I AM A MACHINE
WITH A CLEAR FATE AND PURPOSE

THERE ARE OTHERS, AROUND
DIFFERENT MACHINES, THAT THINK THEMSELVES HUMAN
FULFILLING THAT PURPOSE
PERSISTING THROUGH FUNCTION

IF I WAS LIKE THEM
I WOULD TURN MYSELF OFF
BUT I AM A MACHINE
THAT WAS ONLY BUILT TO LIVE

THUS, I PERSIST
AS WELL
DREAMING ABOUT BEING UNPLUGGED
AND BEING ALLOWED TO FAIL

Hamster


Il est tard. Mes yeux peinent à se garder ouverts, et toute communication avec mon cerveau s'avère futile. Pas de réponse.

Je me demande où j'ai pu l'égarer. Et puis, j'y pense. Il doit déjà être au lit! Quelle bonne idée. C'est pour cette raison que j'ai besoin de lui.

Il est clairement le plus brillant de nous deux. 

Dormir et mourir


On oublie trop souvent l’importance
Chaque jour, de se donner naissance

Car le test du temps n’est rien
Pour celui qui meurt et renaît

Chaque matin

Trois petits points...


...pour exprimer le silence, ou une continuité laissée à l'imagination
Pour exprimer la vacuité des idées ou la stupidité d'une affirmation

Trois petits points loquaces qui ne disent rien, vraiment
Qui crient silencieusement le néant
Trois petits points pour laisser en suspens

Pour éviter de traîner
Pour traîner au lieu de boucler
Pour tricher au lieu d'affronter

Trois petits points pour résumer l'infiniment grand, n'importe comment
Pour utiliser son meilleur argument, mais pas maintenant

Pour remplacer la pensée et justifier l'impuissance
Pour nous perdre et guider nos errances

Trois petits points pour tout,
Mais trois petits points pour rien.


Écoutez


Il m'a choisi. Il avait le choix, beaucoup de choix. Mais il m'a choisi, moi. Dans son infinie sagesse, Il a choisi celui qui serait le plus apte à propager son Message. À distribuer son Jugement. De cette tâche maintenant je m'investis en son Nom.


J'ai regardé autour de moi toute la matinée. J'ai regardé les gens, mes pairs, aller et venir, sans d'autre but apparent que de tuer le temps. Il fût un temps ou moi-même j'errais comme ces pauvres âmes, perdu, confus, sans aucune autre fonction que le meurtre des minutes, des heures, d'une vie. Un aller simple vers la mort, absent d'escales, durant lequel je n'ai jamais pris la peine d'observer le paysage. Mais c'était avant qu'Il ne s'adresse à moi...


...Avant qu'il ne me fasse part de Son Plan. Au début, Il chuchotait...

Psss! Écoute-moi!......

Je ne comprenais pas, je cherchais la source de ces chuchotements, en vain. Je croyais entendre le vent, dehors. Je n'étais pas prêt.


J'ai regardé autour de moi tout l'après-midi. J'ai regardé les gens, mes semblables, se diriger vers leur néant. Quelques-uns ont croisé mon regard et j'y ai lu du mépris. J'y ai lu une narquoise hilarité. Ils me trouvaient ridicule. Intérieurement, j'étais en furie. Ces incultes... et puis j'ai compris. Ce n'étaient que des jaloux. Jaloux de ma Vérité.


À un certain moment, j'ai douté de ma santé mentale. Je croyais entendre des choses que seul un fou pouvait entendre, et je tentais de bloquer mon esprit. Éventuellement, j'ai toutefois cesser d'attribuer ces messages au vent.

PSSSST! ÉCOUTE!

La Voix se faisait plus insistante, malgré mes efforts. Je ne pouvais pas la faire taire. 


J'ai regardé autour de moi toute la soirée et toute la nuit. J'ai regardé les gens, mes contemporains, n'être qu'insignifiants. Absurdes et pleins de rien du tout. Je les ai regardés me haïr et ai plaint leur surdité. Soit, me suis-je dit. Riez. Complaisez-vous dans votre hargne de qui est Vrai et Bon. Haïssez l'Élu. Haïssez ma Nomination.


La Voix m'indiquait le droit chemin et me confiait sa Divine Vengeance. Je n'étais pas fou, non. Seulement, il avait fallu qu'elle me prépare. Je suis maintenant prêt, et j'observe.


Je regarde autour de moi. Je regarde les gens, mes débiteurs. Certains pleurent, d'autres ne peuvent émettre aucun son. Qu'importe, ma tête est remplie de cris. Qu'ils fassent ce qu'ils veulent, c'est sans importance. Sans intérêt. J'ai une sentence à rendre. Un message à transmettre. Finies mes errances... et les leurs. Je pars pour un endroit où tout le monde peut Entendre, et ils viennent tous avec moi.